— Association de quartier —

Portrait Madame Fernande

Bonjour Fernande, vous avez fêté vos 92 ans, où êtes-vous née ? Je suis née le 4 mai 1928 à Fronton, mes parents étaient paysans, on travaillait la terre et ma sœur était placée en ville, j’allais la voir et je trouvais que c’était agréable. Autour de mes 20 ans, une dame qui avait un bébé m’a proposé de garder son enfant à Toulouse, pensez-vous, j’y suis allée. Je la promenais au Jardin des Plantes, elle ne me payait pas beaucoup, mais j’étais nourrie et je me promenais, j’ai trouvé que c’était moins dur qu’à la campagne.

Vous habitiez où en arrivant à Toulouse ? Je suis arrivée dans le quartier St Aubin, j’habitais place Dupuy, j’ai trouvé un logement, une petite chambre, grâce à Madame Ressac qui tenait la parfumerie Marques.

Que faisiez-vous en dehors  de votre métier ?J’adorais danser, le soir je faisais la vaisselle, je me lavais la tête, puis je partais, les cheveux encore mouillés avec une amie, il y avait la « Plantation » sur le Boulevard mais je n’y allais pas, il fallait une belle tenue. Nous allions danser à la caserne Pérignon en haut de la Côte Pavée, je rigolais tout le temps, j’étais coquine à l’époque, c’était la samba, le tango. On rentrait à une heure du matin le long du canal, c’était tranquille, aujourd’hui on me ficherait dans le canal. Et à 7 heures je devais être debout pour reprendre le travail. Quand j’habitais place Dupuy, il se passait beaucoup de choses à la Halle aux Grains, j’y allais quelquefois. On allait aussi au bar les américains, ils sortaient une estrade dehors et j’écoutais Paulette Pastor, il y avait beaucoup d’artistes qu’on écoutait le soir, il y avait foule.

Qu’avez-vous fait après la garde d’enfant ? Je faisais des ménages, puis on m’a embauchée à la cuisine du lycée St Sernin, je travaillais beaucoup, en horaires décalés, même le dimanche, car il y avait les pensionnaires. Puis en 1956, j’ai habité au 8 place Damloup avec mon mari et ma fille dans un petit appartement, il n’y avait qu’une pièce, une grande chambre. Il y avait 3 étages et au-dessus de nous habitait Monsieur Arabel, un espagnol, qui travaillait la nuit, c’était fatigant, mais il était gentil, il nous avait fabriqué une table. Il y avait Monsieur Audinot qui travaillait dans l’aviation, la grand-mère gardait notre fille. Il y avait une boîte de nuit sur la place, c’était bruyant, c’était une boîte de nuit chaude, ils fumaient, ils buvaient, ils se tiraient dessus même la nuit. Sur la place il y avait aussi une petite épicerie, Monsieur Chausson, en face il y avait un pâtissier, il se perdait les oies (il se trompait) souvent en rendant la monnaie mais, vous savez, j’étais pauvre mais j’étais honnête, je lui disais. Il y avait aussi un bar place Bachelier mais c’était des Arabes, on se mélangeait pas trop à l’époque.

Vous y êtes restée longtemps ? Je suis partie de St Aubin au milieu des années 60 et de Toulouse en 1976, nous avons construit une maison avec mon mari à Merville. J’ai continué à travailler à St Sernin, mais nous n’avions qu’une voiture pour deux et je n’avais pas le permis, j’en avais assez d’arriver en retard, mais mon mari ne voulait pas qu’on ait deux voitures. Mais je suis têtue, alors j’ai passé le permis en cachette, quand je l’ai eu mon mari n’y croyait pas, il ne voulait toujours pas acheter de voiture, je lui ai dit : «Réfléchis, je travaille, toi aussi donc je m’en vais si je n’ai pas de voiture». Huit jours après, il est arrivé avec une voiture d’occasion. J’ai fini cheffe de cuisine au lycée St Sernin et j’ai beaucoup regretté de partir en 1984, c’était la fin de ma vie à Toulouse.

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